Enseignement
J'enseigne la philosophie depuis de nombreuses années, auprès des lycéens comme des étudiants de troisième cycle, aussi bien pour des étudiants en philosophie que pour des étudiants en médecine ou en économie qui ont choisi la philosophie comme option. Vous trouverez ci-dessous une liste des enseignements que j'ai donnés, ainsi qu'une description de quelques cours.
Expérience dans l'enseignement
2022-2024
Attachée temporaire d'enseignement et de recherche en philosophie des sciences, Université de Lille (192h EQTD)
Licence Philosophie : Cours magistraux & TD – Histoire et philosophie des sciences ; Cours Magistraux & TD – Histoire de la philosophie moderne ; TD – Méthodologie.
Licence PASS : Cours magistraux & TD – Philosophie générale (« Être animal, être humain ») ; Cours magistraux & TD – Histoire et philosophie des sciences.
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2023
Intervenante en philosophie, Université Sorbonne Paris-Nord. 12 heures.
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Diploôme Universitaire médiateur canin en intervention sociale – Philosophie animale.
2022
Chargée de cours en philosophie, Université de Rouen. 36 heures..
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Licence Philosophie : Cours magistraux – Histoire de la philosophie moderne.
2018-2021
Doctorante-enseignante en philosophie. Université Toulouse 2 - Jean Jaurès. 64h EQTD/an.
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Licence Philosophie : Cours magistraux – Philosophie morale et politique ; TD – Méthodologie du travail universitaire ; TD – Philosophie des sciences.
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Master Philosophie : Cours magistraux – Philosophie de la vie.
Préparation à l’agrégation de philosophie : Cours magistraux – Préparation à l’épreuve écrite de composition philosophique se rapportant à une notion.
2018-2021
Colleuse en philosophie en khâgne classique. Lycée Henri IV, Paris.
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Préparation à l’épreuve orale de philosophie (tronc commun) de l’ENS Ulm.
2016-2017
Professeur de philosophie. Lycée Racine, Paris. 360 h/an.
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Terminale S ; Terminale ES ; Initiation à la philosophie en Première L..
2011-2015
Intervenante en philosophie (terminales littéraires). Lycée Victor Duruy, Paris.
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Cours occasionnels sur la Critique de la Raison pure (Kant) et sur la philosophie du temps de Bergson.
Description de quelques enseignements choisis
Les lois de la nature
L’objectif de notre science semble être de découvrir les lois de la nature, de nous libérer de la croyance et de la superstition pour identifier les relations causales qui gouvernent le monde naturel. La science révèlerait ainsi les secrets de la nature, nous offrant à la fois une maîtrise des phénomènes naturels et une connaissance du monde lui-même. Ces secrets prendraient la forme de lois nécessaires, une même cause produisant toujours nécessairement le même effet.
Cette conception de la science repose sur deux présupposés, complémentaires l’un de l’autre, qu’il nous faudra interroger :
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La nature suivrait la même logique que notre intelligence : les lois scientifiques seraient donc l’exacte traduction des lois naturelles.
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La science ne serait pas une construction humaine mais révèlerait la Vérité du monde lui-même.
L’objectif de ce cours est d’évaluer les prétentions de notre science, et plus généralement de notre connaissance ainsi que de comprendre sur quoi reposent les régularités que nous observons dans le monde qui nous entoure, et que nous appelons « lois de la nature ».
Voici différentes questions auxquelles nous tenterons de répondre pendant ce cours : La nature suit-elle notre logique ? S’il y a un écart entre notre logique et celle de la nature, comment évaluer la scientificité d’une théorie ? Sa vérité ? L’expression « lois de la nature » semblant recouvrir aussi bien les lois physiques que la sélection naturelle, et même certaines inclinations humaines, nous nous demanderons également quelle est la causalité à l’œuvre dans la nature. « La nature » forme-t-elle un tout homogène ?
Ces questionnements ont des enjeux contemporains. Aujourd’hui, toute critique des théories scientifiques encourt le risque d’être accusée d’obscurantisme, tandis qu’une nouvelle forme d’obscurantisme (fake news, complotisme) risque de nous conduire à un relativisme des savoirs, remettant en cause non seulement la science mais notre rapport objectif au monde. Mais ces questions aussi ont une histoire : elles étaient déjà posées par les philosophes de l’Antiquité, bien que sous une forme différente de leur formulation actuelle. Il nous faudra donc étudier la façon dont les questionnements philosophiques se sont transformés au fil des différentes révolutions scientifiques qui ont constitué autant de bouleversements pour notre façon de concevoir la nature et notre rapport au monde.
En tentant d’élucider ce que nous entendons par « lois de la nature », le rapport qu’entretiennent réellement les lois de notre science avec les régularités de ce monde dit « naturel », nous étudierons les grands problèmes de la philosophie de la connaissance et des sciences, et l’évolution de ces problèmes au cours de l’histoire. Ce cours abordera également les débats contemporains sur la science et étudiera les conséquences que les différentes conceptions philosophiques de la science peuvent avoir, non seulement pour le travail théorique mais aussi pour la pratique.
Le concept et la vie
Reprenant le titre d’un article de Georges Canguilhem, notre cours s’intéressera aux rapports entre l’intelligence et la vie : comment l’intelligence humaine, mode de connaissance de certains êtres vivants, peut-elle atteindre, comprendre la vie ? Notre intelligence nous permet-elle de connaître la vie ? Ou bien procédons-nous de la vie vers l’intelligence, vers le concept ? Nous serons attentifs à cet égard à l’équivocité du terme de « vie » qui peut renvoyer au vivant biologique comme au vécu personnel.
Cette réflexion prendra essentiellement appui sur L’Évolution créatrice de Bergson et tout particulièrement sur les trois premiers chapitres, qui interrogent comment notre intelligence « adaptation […] déposée en cours de route par le mouvement évolutif » est capable de comprendre le phénomène de la vie dont elle n’est pourtant qu’un produit. Nous enrichirons notre réflexion par des incursions dans La connaissance de la vie de Canguilhem.
Être animal, être humain
L’être humain est un animal. Plus précisément c’est un mammifère placentaire de l’ordre des primates. Et cependant, il se distingue des autres espèces, au point qu’on le classe traditionnellement dans un règne à part : il y aurait le règne végétal, le règne animal et le règne humain. Mais si la distinction des deux premiers règnes peut se faire sur des critères morphologiques, la distinction de l’animal et de l’humain est difficile à établir sur la seule analyse du corps. Plusieurs critères ont été avancés au cours de l’histoire : l’être humain serait le seul à avoir la raison, ou encore le langage, ou la faculté de fabriquer des outils. Il serait une créature entre l’animal et les dieux par sa conscience, sa morale, sa liberté. La distinction semble alors parfois plus métaphysique ou axiologique que réellement scientifique. S’il est aisé de dire que l’être humain se distingue de la méduse, il est moins évident d’établir une différence de nature entre les êtres humains et les grands singes qui fabriquent leurs outils, vivent en société, transmettent des comportements culturels à leurs descendants. Quel critère alors utiliser pour les distinguer ? Sommes-nous des singes comme les autres ? Durant ce cours, nous étudierons l’évolution de ce questionnement dans l’histoire.
La distinction du végétal, de l’animal et de l’humain a en effet longtemps été posée en termes de hiérarchie, l’être humain étant considéré comme le summum de la création, différent par nature du reste des êtres vivants. Différents critères de différenciation ont été posés : l’âme de l’animal et l’âme de l’humain seraient de nature différente ; l’animal ne serait qu’une machine là où l’humain aurait un esprit ; l’animal ne serait qu’instinctif quand nous serions des êtres rationnels… Mais la théorie de l’évolution darwinienne semble avoir remis en cause cette hiérarchie des espèces, donnant naissance à une inquiétude nouvelle : l’être humain ayant évolué à partir du singe, la différence ne serait plus que de degré. De nouveaux critères ont alors été avancés pour distinguer l’être humain de l’animal : l’humain aurait une capacité de signification infinie là où l’animal serait limité par son instinct ; il serait libre et moral, alors que l’animal ne serait que cruauté et égoïsme.
L’objectif de ce cours est d’étudier l’évolution de notre perception de l'animal et du rapport de l’animalité et de l’humanité. Nous analyserons les textes philosophiques classiques qui ont fondé notre conception de l’animalité. Mais nous étudierons également des approches plus contemporaines en philosophie de l’esprit ainsi qu’en sciences du comportement animal, approches qui nous permettront de nuancer et de complexifier le problème posé par la distinction de l’animal et de l’humain. Nous nous demanderons aussi comment cette évolution dans la conception de l’animalité a conduit à des changements dans notre rapport aux autres animaux. Nous interrogerons enfin les enjeux éthiques de ces différentes conceptions : comment notre différence nous engage-elle vis-à-vis des autres espèces ?
Le temps
Il y a eu une multiplicité de caractérisations du temps au cours des siècles. Cette pluralité conduit à une méfiance. Le temps ne serait-il qu’une notion nominale ? Si le temps renvoie à une réalité, cette réalité serait-elle uniquement subjective ? Ou, enfin, le temps aurait-il une réalité objective, une véritable épaisseur ontologique, voire serait-il l’épaisseur ontologique de toute réalité ?
Pour commencer, nous allons partir du principe généreux que la notion de temps paraît bien renvoyer à quelque chose hors de nous, puisque s’il y a bien quelque chose par excellence que nous ne semblons pas maîtriser, c’est le temps. Comme le dit le fameux exemple de Bergson « j’ai beau faire, je dois attendre que le sucre fonde » (L’Évolution créatrice). Même si on suppose que le temps ne serait qu’un retard par rapport à la réalisation d’un programme tracé de toute éternité, du point de vue de notre existence, il semble que nous n’ayons pas le choix d’attendre ou de ne pas attendre : le temps paraît donc avoir une réalité objective indépendante de nous, parce qu’il semble passer malgré nous. De là, nous inférons souvent que nous sommes dans le temps ; or, dès que nous nous interrogeons sur l’expérience vécue du temps, nous voyons que cette expérience nous renvoie immédiatement au changement. Le temps qui passe est associé aux changements que nous observons. Ne confondons-nous pas alors expérience du changement et expérience du temps ? Qu’est-ce que le temps indépendamment de ce changement ? L’alternative serait donc la suivante : le temps a-t-il une réalité objective ou n’a-t-il de réalité que pour nous ? Par ailleurs, cette alternative est-elle exclusive d’autres conceptions du temps, alors même que l’unité de la notion de temps paraît problématique. Peut-être serait-il en effet plus juste de distinguer le temps objectif (temps des physiciens ?) du temps subjectif ou temps vécu (expérience de la durée).
Cela étant dit, au sein même du temps dit objectif, il n’est pas certain que le concept soit unitaire, et que le temps réversible des lois fondamentales de la physique puisse être comparé au temps irréversible de la thermodynamique. Si on considère habituellement que l’alternative est entre le temps objectif et la durée subjective, un des objets de ce cours sera cependant d’interroger le présupposé sous-jacent à l’alternative, considérant la notion de temps comme unitaire. Non seulement rien n’assure que le temps existe, mais rien ne nous dit qu’il y ait du sens à parler d’un seul temps, du temps comme d’un concept univoque. L’enjeu de cet examen sera de penser une notion de temps enrichie qui permette de sortir d’une alternative qui est peut-être immédiatement faussée par le présupposé d’une unité problématique. Mettre en évidence la pluralité de la notion de temps, ce n’est pas forcément promouvoir une conception contre une autre, mais c’est enrichir une compréhension dans la lignée d’une approche bergsonienne prenant en considération la multiplicité des compréhensions du temps.
Peut-on faire une science du vivant ?
L’objectif de ce cours est d’étudier la constitution de la biologie comme science, d’analyser les différents problèmes qu’elle a rencontrés, et de tenter de définir les critères de son autonomie scientifique. La connaissance scientifique du vivant pose en effet plusieurs problèmes : les phénomènes biologiques ne se répètent pas (chaque organisme est unique) ; les lois biologiques ont une histoire (elles n’existent pas de toute éternité) ; ses objets (les organismes) ne sont pas analysables à partir de leurs parties élémentaires (problème de l'organicisme ; problème de l’émergence). Ainsi, l’étude du vivant remet en question certains des fondements de la science en général : la prétention à l’universalité, la prédiction, et la méthode analytique.
L’enjeu de ce cours sera donc d’une part de poser les fondements épistémologiques des principaux problèmes propres à la philosophie de la biologie. On posera ainsi les questions suivantes : les énoncés biologiques peuvent-ils avoir valeur de loi, alors qu’il existe dans la nature ce que l’on appelle des « monstres » qui justement dérogent à la norme ? A quoi servent les énoncés biologiques s’ils ne permettent pas de prévoir, s’ils ne sont précisément pas déterministes ? Comment faire une science des cas particuliers ? De l’individuel ? Quelle est la nature de l’explication en biologie ? Cela nous conduira d’autre part à réfléchir plus généralement aux critères de la science : qu’est-ce qui fait qu’on peut définir une connaissance comme scientifique ? La biologie sera l’occasion d’interroger à nouveaux frais ce que doit être la science du point de vue de son exigence théorique, mais aussi du point de vue de son exigence éthique.
Les passions chez Descartes
Descartes est généralement présenté comme le dualiste par excellence, celui qui a posé la séparation de l’âme et du corps comme deux substances distinctes. Cependant, l’être humain est bien l’union des deux, et une union totale. Du point de vue de la connaissance métaphysique – point de vue qui est celui des Méditations métaphysiques – il est nécessaire de distinguer les substances. Mais pour pouvoir résoudre les problèmes posés par la Princesse Elisabeth, qui concernent directement la conduite de la vie, Descartes doit pouvoir répondre de l’union que représente l’être humain. Car l’être humain n’est pas un esprit dans un corps, mais un composé complet. Et cette union se manifeste notamment par nos passions qui « incitent et disposent notre] âme à vouloir les choses auxquelles elles préparent [notre] corps » (art. 40 des Passions de l’âme). Par elles, nous savons que nous ne sommes pas seulement logé dans notre corps « ainsi qu’un pilote dans son navire », mais que nous sommes « très étroitement et tellement confondu et mêlé » à lui que nous composons comme « un seul tout avec lui » (Méditations métaphysiques).
L’objectif de ce cours est d’analyser la façon dont Descartes tente de résoudre le problème de l’union de l’âme et du corps à travers la compréhension des passions, développant par là non seulement son ontologie (sa compréhension de l’être), mais aussi une véritable morale capable de nous éclairer sur la conduite de notre vie.
Qu'est-ce qu'un peuple ?
Lorsqu’on parle d’un peuple, on parle d’une multitude d’individus qu’on désigne sous le terme de « peuple » parce qu’ils ont quelque chose en commun. On peut souligner d’emblée que ces individus sont humains : on ne parle pas de « peuple » pour désigner un groupe d’animaux. On peut éventuellement parler de population. Le peuple n’est donc pas la population : ce que les individus ont en commun, et qui fait qu’on les appelle « peuple » n’est pas le peuplement d’un territoire (le peuple juif pendant longtemps n’a pas eu de territoire). Leur unité n’est pas non plus une unité naturelle, une unité de l’espèce. On ne parle pas plus du « peuple des poissons » que du « peuple humain ». Il y a une unité dans un peuple qui fait qu’on ne parle pas de peuple pour désigner tout groupe d’individus humains : un groupe de personnes attendant le bus n’est pas un peuple. Un peuple est une unité formée de plusieurs individus liés non pas par des caractéristiques naturelles, mais culturelles.
Il faut ajouter à cela une dimension socio-politique : qu’on parle du peuple français ou du peuple juif, on parle, dans les deux cas, d’un groupe d’individus qui forme une certaine communauté et qui peut avoir un rôle d’acteur politique. D’où l’ambiguïté de la réalité désignée sous le terme du peuple : le peuple rassemble une multiplicité d’individus, considérés du point de vue culturel et politique comme formant une unité, et plus précisément un sujet collectif. Paul Valéry relève la contradiction dans Regards sur le monde actuel : « Le mot peuple désigne tantôt la réalité indistincte et présente nulle part, tantôt le plus grand nombre opposé au nombre restreint des individus plus fortunés ou plus cultivés. ». D’un côté, on a un peuple un, mais dont on ne sait où trouver l’unité, de l’autre on a une multiplicité d’individus dont l’unité semble fictionnelle, voire qui semble contredire cette unité.
L’objet de ce cours sera de tenter de prendre en charge cette contradiction, et de comprendre ce qui peut fonder l’unité du peuple au-delà de la simple dénomination, ce qui caractérise un rassemblement humain comme étant un peuple.